« Ce n'est plus une vie », « je veux encore vivre, même avec cette maladie », « ma vie n'a plus de valeur » : confronté à la maladie, à la déchéance physique, à la perte provisoire ou définitive de certaines capacités, chacun d'entre nous peut être conduit à énoncer de tels propos. Quoi de plus délicat cependant, que l'évaluation de la valeur de la vie ? Marie Gaille aborde le sens et la portée de cette réflexion dans une situation où elle s'impose dans toute sa radicalité : celle des décisions de maintien ou d'interruption de la vie prises au chevet du patient dans les hôpitaux. En choisissant d'aborder ainsi la question de la valeur de la vie, elle fait le pari qu'une approche philosophique nourrie par une rencontre avec l'univers de la médecine contemporaine éclaire davantage le sens de cette notion, son fondement et ses limites, qu'une approche abstraite de tout contexte. Sa démarche cherche aussi à établir un dialogue entre philosophes et médecins en proposant une analyse des différents contextes thérapeutiques où une décision de maintien ou d'interruption de la vie doit être prise. À la lumière de cette analyse, Marie Gaille propose une réflexion critique sur les usages de l'idée de valeur de la vie pour en désavouer la pertinence et en nier la légitimité éthique. Les patients, malades mais aussi citoyens, doivent forger en concertation avec les médecins d'autres critères pour fonder une décision aussi déterminante que celle de maintenir ou d'interrompre le cours d'une vie humaine.
Marie Gaille est habilitée à diriger des recherches en philosophie, titulaire d’un Master en Sciences politiques (Central European University, Budapest ; Université d’Etat de New-York, USA), agrégée de philosophie et ancienne élève de l’école normale supérieure. Ses recherches portent sur l’histoire et le sens de la relation entre médecine, anthropologie et philosophie. Elles visent à expliciter, sur un plan à la fois épistémologique et éthique, les implications de l’expérience de la maladie, de la dimension corporelle de la vie humaine et du rapport des êtres vivants à leur milieu de vie. Son travail porte, en particulier, sur les décisions médicales qui engagent une conception des seuils de la vie valant d’être vécue aux différents âges de la vie. Son approche est conceptuelle, critique et normative, également soucieuse de contextualiser les enjeux traités et partant, attentive aux comparaisons transnationales et aux enjeux du travail interdisciplinaire et professionnel entre philosophie et médecine. Depuis sa thèse de doctorat en philosophie publiée en 2004, Liberté et conflit civil – la politique machiavélienne entre histoire et médecine, elle poursuit une réflexion sur le droit de cité, le conflit civil et la dynamique démocratique. En septembre 2021, elle est nommée Directrice de l’Institut des sciences humaines et sociales du CNRS.
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19h - 21h
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